décembre 2, 2024
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CE QUE JE PENSE DE « L’AFFAIRE SANSAL » par Abbes HAMADENE

CE QUE JE PENSE DE « L’AFFAIRE SANSAL »

Par Abbes HAMADEN in Facebook le 02 décembre 2024

Dénoncer ou pas l’arrestation de Boualem Sansal ? Répondre à cette question posée dans ces termes, c’est prendre le risque d’enfermer le débat dans une binarité stérile.

La sinistre loi des débats binaires (pour ou contre), conduit souvent au triomphe d’une vérité réductrice qui vise à nous faire oublier les questions essentielles auxquelles le débat binaire fait écran.

Sur cette arrestation devenue « l’affaire Sansal », Il s‘agit pour moi de prendre position librement sans renier mes principes et valeurs et sans faire le jeu d’un des protagonistes qui serait à l’opposé de tout ce que je suis.

BOUALEM SANSAL L’ULTRACREPIDARIEN

Qu’est-ce que l’ultracrépidarianisme ? C’est l’art de parler de ce qu’on ne connait pas, de donner son avis sur tout, sans avoir toujours les connaissances sur les sujets abordés.

Sans vouloir remettre en cause ses qualités de bon écrivain, la liste des approximations et des contre-vérités proférées par Boualem Sansal sur les plateaux français est pléthorique, il serait vain et long de les énumérer pour les commenter.

Exemple : « C’est la France qui vous a donné ce nom ». Faux et archi-faux ! L’appellation Algérie ne sort pas de la poche du ministre de la guerre français lorsqu’il l’a adoptée en octobre 1839, il provient du nom de la ville d’Alger.

Or, le nom d’Alger (transcription en français de Djazaïr) a été donné par le chef amazigh Bologhine Ibn Ziri fondateur de la dynastie des Zirides.

D’ailleurs, ce nom Djazaïr a été évoqué par Ibn Khaldun dans sa Moqadima (1377), par le géographe andalous Al Bakri (10è S) et par l’écrivain espagnol Cervantes dans son livre « Información de Argel » en octobre 1580…

Si l’origine du nom d’un pays est si importante, pourquoi ne pas rappeler que le nom France vient des Francs, une tribu germanique ?

BOUALEM SANSAL, UN ECRIVAIN ALGERIEN DEVENU COQUELUCHE DE L’EXTRÊME DROITE FRANCAISE

Traiter l’Algérie de « petit truc qui n’a pas d’histoire » dans un média d’extrême droite, un média haineux et xénophobe est une provocation abjecte et une offense insultante envers tout un peuple, son histoire et sa mémoire.

Bien évidemment, l’Algérie ne connaissait pas les frontières actuelles héritées de la colonisation, mais ce ne sont pas les frontières qui font un pays, c’est avant toute chose sa culture, ses langues, sa mémoire, ses personnalités historiques, sa contribution à la culture universelle…

Faut-il rappeler aussi que les frontières séparant les Etats sur tous les continents ont été sans cesse redéfinies au cours de l’histoire.

Emporté par sa dénonciation de l’islamisme radical, position qui relève de l’opinion politique, de glissement en glissement, d’interview en interview, il se fait pourfendeur virulent des flux migratoires considérés comme une cinquième colonne qui prépare le grand remplacement, thèse nauséabonde de l’extrême droite post-fascisante.

ATTEINTE A L’INTEGRITE TERRITORIALE : UNE ACCUSATION GROTESQUE

La notion d’atteinte à l’intégrité territoriale est une notion du droit international, elle vise le préjudice matériel portée contre le territoire d’un Etat par un autre Etat. Cette notion n’est pas à confondre avec le « séparatisme » qui relève du domaine interne : la dissidence d’une région par exemple.

Les propos de Sansal concernant la frontière entre l’Algérie et le Maroc ne sont que des paroles futiles et sans aucune portée juridique.

Faut-il rappeler à ce propos que la frontière entre l’Algérie et le Maroc ne fait l’objet d’aucun conflit juridique aujourd’hui et ce, depuis la signature d’une convention entre les deux pays à Rabat en 1972 ?

Les représentants des quarante pays réunis à Rabat à la séance de clôture de la conférence  » au sommet  » de l’Organisation de l’unité africaine (O.U.A.) ont été témoins de cet engagement. La signature des conventions a eu lieu en leur présence.

Cette convention ratifiée par l’Algérie en 1973 et par le Maroc en 1992 est enregistrée au niveau du bureau de l’ONU le 31 juillet 2002 sous le N° : 38587.

En quoi les paroles d’un quelconque écrivain peuvent-elles menacer l’intégrité du territoire protégé au niveau onusien ? Il faut dire que le pouvoir nous a habitué à l’utilisation abusive du terrorisme au risque de banaliser ce sujet extrêmement grave.

Le pouvoir arrête qui il veut, quand il veut, libère qui il veut, quand il veut.

Fermer les yeux sur cette pratique un jour, c’est l’autoriser un autre jour : ce pourra être n’importe quel citoyen ou militant pacifique faisant preuve d’un patriotisme sans faille.

CEUX QUI DEMANDENT LA LIBERATION DE SANSAL N’APPARTIENNENT PAS TOUS A LA FACHOSPHERE

Depuis l’arrestation de Sansal dans des conditions obscures, on assiste à une montée sans précédent des voix les plus bruyantes de la fachosphère française qui profitent de la situation, au prétexte de défendre la liberté d’expression, pour cracher leur haine historique de l’Algérie.

Cependant, il convient de préciser que d’autres voix demandent la libération de Sansal, non pas dans le but d’exprimer leur accord avec ses prises de position, mais par attachement à la liberté d’expression.

Parmi lesquels les prix Nobel de littérature connus pour leur défense des droits de l’Homme à l’exemple du Nigerian Wole Soyinka, le Clezio et Annie Ernaux amie de l’Algérie et grande militante de la cause palestinienne et de toutes les causes justes.

L’ARRESTATION DE SANSAL N’EST PAS LE BON CHOIX : ON EN A FAIT UN MARTYR !

Nous sommes tous indignés par certains propos insultants tenus par Sansal, encore plus lorsqu’il les exprime dans des médias zemmouriens qui ne cachent pas leur haine des étrangers de façon générale et de notre pays en particulier.

Notre colère est certes justifiée, mais je pense que son expression par le recours à son arrestation est contre-productive. Mais visiblement, le pouvoir algérien n’arrive pas à se débarrasser de ses mauvaises habitudes : il préfère l’argument de la force à la force de l’argument.

La confrontation des idées n’est pas une solution de faiblesse, elle exige une solide foi dans ses arguments. Il aurait été facile et plus profitable de répondre aux propos souvent fantaisistes, inconséquents et farfelus de Sansal en l’invitant à un débat public ou en exigeant un droit de réponse. Un étudiant en histoire ou en droit international aurait suffi pour démonter ses affirmations absurdes.

Au lieu de cela, le pouvoir en a fait un martyr et prend le risque d’exposer son système judiciaire au regard du monde qui va scruter la suite donnée à cette arrestation.

Chercher à trouver des solutions par la seule voie de la répression cela conviendrait à espérer « obtenir une rose en plantant une mauvaise herbe » pour paraphraser les mots de Ghandi.

POUR UNE AFRIQUE DU NORD UNIE DÉMOCRATIQUE AU SERVICE DES PEUPLES

Photo L’écrivain algérien Boualem Sansal, en 2019. © Bettina FLITNER/LAIF-REA

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