Dialoguer et négocier avec qui et quoi?
Par Yahia Bounouar 07 mai 2019
Dans cette période sensible que traverse notre pays de nombreuses questions se posent aux citoyens. La formidable révolution pacifique en cours depuis le 22 février 2019 a déjà à son actif un bilan important mais très insuffisant pour une révolution de cette ampleur. Certes, la mobilisation des algériens a empêché le 5ème mandat ainsi que le 4ème prolongé. Elle a délégitimé tous les pouvoirs politiques, qui constituaient la vitrine civile, derrière laquelle manœuvre le commandement militaire. Depuis la démission forcée de Bouteflika, le peuple algérien est face aux véritables détenteurs du pouvoir, ceux qui se sont accaparés depuis des décennies, le droit de désigner le Président, de l’adouber publiquement, de mobiliser l’appareil de l’état pour le faire avaliser leur choix par des élections truquées.
Le fait d’avoir brisé ce paravent est une victoire indéniable mais ce qu’est qu’une étape. Les algériens, depuis près de trois mois, expriment clairement leur demande de, non seulement, en finir définitivement avec ce système mais aussi et surtout leur détermination à bâtir une véritable état de droit, dans lequel ils pourront vivre librement, dignement et dans la prospérité.
Maintenant que les choses se sont clarifiées et qu’il ne reste dans l’équation que deux acteurs, d’un coté, le peuple mobilisé pacifiquement et de l’autre, le commandement militaire, la solution passe évidemment par le dialogue.
Dialoguer de quoi et négocier quoi ?
Le préalable de base étant que le pouvoir appartient au peuple et qu’il est aujourd’hui entre les mains du commandement militaire, le dialogue et la négociation ne peuvent porter que sur la restitution du pouvoir par le commandement militaire à son détenteur légitime, c’est à dire le peuple.
Dans cette optique, aucun dialogue, aucune négociation ne trouvera de soutien populaire tant que le commandement militaire n’annoncera pas officiellement au peuple algérien et au monde entier qu’il a pris la décision de remettre le pouvoir au peuple, de retourner dans ses casernes et de ne plus jamais s’ingérer dans la vie politique. Le jour où il le fera et seulement ce jour là, s’ouvrira une phase pour mettre en place les mécanismes de transition. Les solutions existent, les personnalités consensuelles pour gérer cette phase de transition existent et la formidable mobilisation populaire accompagnera, pas à pas, l’édification d’un nouvel état, une nouvelle République, à laquelle aspirent les algériens.
Alors, oui pour dialoguer, oui pour négocier mais seulement les mécanismes pour rendre au peuple sa souveraineté, après 57 ans d’usurpation.